Sarah Arnaud, docteure en philosophie : Philo-Situé.e.s à l'UQAM
- Metaxu
- 30 déc. 2023
- 13 min de lecture
Lors de son doctorat en philosophie à l'UQAM, Sarah a lancé l'initiative Philo-Situé.e.s (initialement Fillosophies) avec d'autres étudiantes du département. Elle nous explique ici la genèse de ce projet, ses grands axes, et finalement nous présente brièvement ses recherches personnelles.
Metaxu : Pourrais-tu nous parler de ton parcours ?
S. A. : J’ai commencé la philosophie à Paris en France à la Sorbonne où j'ai fait ma licence et mon Master - c'est un master de philosophie des sciences - et je suis ensuite partie à Montréal au Canada pour faire une partie de mon doctorat. J’étais en cotutelle de thèse entre Paris Sorbonne et l’Université du Québec à Montréal – L’UQAM où j'ai passé finalement la majeure partie de mes études de doctorat. Après ma thèse, j'ai enseigné un petit peu dans des cégeps (ce sont des institutions entre l'école secondaire et l'université au Québec). J’y ai enseigné la philosophie et puis j'ai fait quelques études postdoctorales un peu partout dans le monde : un premier postdoc à New York pendant 2 ans, je suis ensuite rentrée à Montréal pour un post doc d'un an là-bas combiné à de l’enseignement durant la pandémie. J’ai ensuite effectué un postdoc en Belgique à Anvers, et enfin un dernier à London (Ontario, Canada) durant un an et demi, avant d'avoir d’obtenir le poste que j'ai en ce moment en tant que professeur de philosophie à l'Université de Clemson en Caroline du Sud (USA). Je suis visiting assistant professor, ce qui signifie que j'ai un contrat renouvelable pour l'instant à durée déterminée.
Metaxu : Et c’est donc durant ton passage à l’UQAM que tu as fondé, avec d'autres étudiantes, Fillosophie qui deviendra Philo-Situé.e.s ?
S. A. : Oui tout à fait, c'était en 2013, j'étais dans un département majoritairement masculin - mais comme beaucoup de départements de philosophie je pense dans le monde – dans lequel y enseignaient deux ou trois professeures femmes, le reste était des professeurs hommes (environ une vingtaine). C’est là qu’avec quatre autres étudiantes femmes au sein du département, nous avons commencé à se parler de cela au début : du fait que nous n’avions pas beaucoup de représentations des femmes en philosophie, que ce soit au niveau de notre institution, de notre département, ou même au niveau du contenu philosophique. Ce que nous lisions ou étudions, c'était principalement des hommes. Donc oui, c’est comme cela que Fillosophie a commencé : par une discussion entre nous sur cet état de fait, sur ce problème quelque part, et nous nous sommes demandé si nous pouvions faire quelque chose pour contribuer un petit peu à ce que cela change.
Metaxu : et, factuellement, comment avez-vous fait ? Êtes-vous êtes allé.e.s frapper à la porte de la faculté ? Ou auprès des cercles étudiant.e.s ?
S. A. : À l'issue de notre première discussion, nous nous sommes dit qu’il serait intéressant d'aller rencontrer les professeures femmes du département pour savoir ce qu’elles pensaient de ce problème. Elles nous ont informées qu’elles seraient tout à fait prêtes a soutenir quelle qu’initiative que ce soit. Nous partions donc avec un appui, un soutien, au niveau du département de philosophie - en tout cas en partie. Nous nous sommes ensuite dit que pour pouvoir augmenter un petit peu la représentation des femmes en philosophie, ce serait bien de leur donner de l'espace, de créer une série de discussions, de conférences ou de présentations – nous ne savions pas trop au début quelle forme ça allait prendre - où les femmes seraient en fait les personnes qui interviendraient. Petit à petit, nous en sommes venues à nous dire que ce qui pourrait être intéressant, ce serait qu’une femme du département parle de ses recherches, et que nous organisions cela régulièrement. Cela a donc commencé comme cela : avec cette idée de donner un temps pour les femmes du département de présenter leurs recherches devant tout le monde évidemment, donc pour que ce genre de vision du monde - parce que je pense que cela s'inscrit dans des visions du monde – change. Il nous semblait important que tout le monde puisse assister à ça, par conséquent nous avons proposé une série de conférences qui seraient données par des femmes en philosophie sur tout un tas de sujets philosophiques - et pas uniquement relevant de sujets de philosophie féministe. Tous sujets philosophiques confondus devant des philosophes femmes, hommes, et non binaires, intéressé.e.s à assister à ces présentations. Alors concrètement, dans les premiers temps, nous avons réservé une salle dans le département pour un mercredi après-midi, nous avons informé les membres du département, les étudiants, étudiantes et les professeur.e.s de la venue de telle personne pour une intervention - il s’agissait d’une étudiante de maîtrise pour la première, une des cinq personnes ayant fondé le groupe avec moi. Elle a présenté son travail. Nous avons eu 10, 15 personnes qui sont venues l'écouter, lui poser des questions, suivant un format académique avec une présentation de sa part et puis un moment de question-réponse, et voilà ça a commencé comme ça dans une dans une salle de L’UQAM, avec les membres du département. Ça, c'était vraiment le début puis après cela a grossi.
Metaxu : et juste une question avant que tu ne m'expliques comment cela a grossi, y avait-il un cours de philosophie féministe à l’UQAM ou pas ? Cela faisait-il partie du cursus à l'époque ?
S. A. : Je ne pense pas mais il faudrait vérifier. Je sais que maintenant cela fait partie du cursus mais je ne pense pas que ce soit un cours obligatoire (encore une fois à vérifier) parce que cela fait plusieurs années que je suis sortie de l’UQAM et que j’y ai réalisé mon doctorat sans passer par tout le cursus dispensé là-bas. Il n’est pas impossible que maintenant il y ait un cours qui soit requis. Mais aucune des enseignantes ne dispensait de cours de philosophie féministe à l’époque. Ce n'était pas quelque chose de clairement défini, institutionnalisé, même si l'université en question possédait un institut d'études féministes. Il faudrait vérifier si à l’époque c’était le cas. Nous avons fondé cela en 2013, cela fait 10 ans maintenant. Entretemps, le nom du projet a changé également. Cela s’appelait initialement Fillosophie mais nous avons décidé, il y a quelques années, plus récemment, d’avoir une approche un petit peu plus intersectionnelle, moins basée sur une binarité homme-femme justement, et qui tiennent compte du fait qu'il y a d'autres minorités de genre que les femmes. Et Fillosophie, cela faisait explicitement référence aux femmes, aux filles, mais en ne tenant pas nécessairement compte des autres minorités de genre, ou en tout cas, en ne les mettant pas du tout en avant. Nous avons alors opté pour Philo-Situé.e.s. L’idée derrière ce nom, est de faire référence aux standpoint theories donc les théories du point de vue situé qui prennent pour point de départ l'idée que la connaissance ne peut être objective quand elle part d'un seul point de vue, et que pour fonder la connaissance du mieux possible - si je peux le dire un peu vulgairement - ce qu'il faut, c'est multiplier les points de vue. Et notamment donc également prendre en compte les points de vue des personnes marginalisées.
Metaxu : Tu nous disais que le projet avait ensuite pris plus d’ampleur ? Comment cela ?
S. A. : Parce qu’il s’agissait d’un problème qui n’était pas tout à fait reconnu au moment où nous avons mis cela sur pied -la sous-représentation des femmes en philosophie. C'était considéré comme le résultat probablement d'un choix. Après tout, pouvait-on entendre, les femmes n'ont pas moins le droit que les hommes d'étudier la philosophie donc le manque de représentation n'est que le résultat d'un ensemble de choix qui sont différents chez les femmes et chez les hommes. C'est un exemple parmi tant d'autres mais l'idée est que le problème a été de plus en plus reconnu - et pas nécessairement grâce à nous. Je pense que cela fait partie d'une évolution morale du monde en général - enfin, en tout cas, de certains endroits du monde et de certains milieux qui reconnaissent que la discrimination envers certains groupes n'est pas réglée, et continue, et qu'elle se manifeste dans la représentation et le manque de représentation des minorités de genre, notamment en philosophie, mais ailleurs aussi. Et donc, cela a pris de l'ampleur, parce que ce problème a été de plus en plus reconnu, et que notre entreprise a été de plus en plus perçue comme quelque chose de légitime et d'important, alors que ce n'était pas nécessairement le cas au début.
Au début, nous organisions cela dans une salle de L’UQAM en envoyant un courriel aux gens du département, puis petit à petit, nous avons diffusé l'information dans d'autres département, ou dans d'autres universités aussi à Montréal. Nous avons demandé de l'aide financière aux associations étudiantes, au Département de philosophie, et puis petit à petit, nous avons fait des demandes de bourse un peu plus importantes. Nous avons participé à des concours de bourses et obtenu des montants d'argent plus importants, ce qui eu pour conséquence de nous permettre d’inviter des professeurs de philosophie ou des chercheuses en philosophie, qui venaient d'ailleurs. Nous pouvions nous permettre de les faire voyager, de les faire venir à l’UQAM, et pour ça, évidemment, il nous fallait un un budget. Cela a créé une visibilité aussi au sein du département, je pense. Nous avons reçu de plus en plus de monde, le public a grossi de plus en plus, et nous avons pu aussi grâce à ces subventions construire un site internet et donc diffuser l'information un peu plus globalement. Voilà donc comment cela a pris de l'ampleur.
Metaxu : Et dans les retours des étudiant.e.s, avez-vous senti un intérêt pour cette approche ? Étaient-elles/ils sensibilisé.e.s au fait qu'il y avait une véritable tentative de visibiliser plus les femmes ou était-ce une fréquentation neutre plus en lien avec les thématiques présentées ?
S. A. : C'est une question difficile parce que l’on ne posait pas nécessairement aux personnes de l'audience, mais il est certain qu’il y avait au début des personnes qui étaient sympathiques à la cause. Elles étaient peu nombreuses au début et nous avons dû faire face à quelques difficultés, notamment lors des premières demandes de subventions que nous avions introduites auprès de certaines instances qui furent refusées sur le prétexte que ce n’était pas suffisamment inclusif (puisque seules des femmes présentaient), que cela n’était pas ouvert aux hommes,… Cela a pris un petit peu de temps avant que ça n'évolue, et je crois que les femmes qui venaient présenter leurs recherches présentaient des recherches qui intéressaient les personnes qui venaient, bien sûr. En tout cas, je l’espère. Au niveau de ce problème de sous-représentation et de l'importance que cela change, oui, il est bien possible qu’il y ait des gens qui soient venus au début uniquement pour soutenir le projet, même s’ils n'étaient pas nécessairement particulièrement intéressés par le sujet en question. C'est certain qu'il y avait des personnes qui venaient avec ce but là uniquement.
Metaxu : Je voulais juste rebondir sur ce que tu disais parce que comme je te l'expliquais avant que nous ne débutions cette interview, je reviens du congrès de la philosophie féministe qui se tenait au CNRS à Paris, où une enseignante qui faisait partie de l'Institut du genre (IdG) parlait du fait que qu’ils reçoivent des propositions de projets en lien avec le féminisme dans énormément de champs académiques mais que les deux dans lesquels ce type de projets ou de demandes étaient les moins représentés étaient la philosophie et le droit. J’ai trouvé cela vraiment intéressant et je pense que cela répond vraiment à ce que vous aviez déjà pointé à ce moment-là et ce que vous avez essayé de mettre sur pied.
S. A. : Je serais curieuse de savoir ce qui se passe en droit aussi.
Metaxu : Avez-vous dû faire face à de véritables mouvements d'opposition ? Des réflexions ou du sabotage non caché, lié au fait que votre projet avait un soubassement féministe ?
S. A. : Oui. Des réflexions qu'on nous rapportait du type telle ou telle personne a dit ça, ou pense ceci, des gens en philosophie, et d'ailleurs. Certaines d'entre nous ont reçu des messages anonymes indiquant que notre entreprise était tout à fait discriminatoire, que nous étions en train de saboter la philosophie et le département, que nous étions en train de créer une culture extrêmement problématique au sein du département, … Nous avons été plusieurs à recevoir ce genre de choses. Bien sûr, nous avons dû faire face à beaucoup d’opposition, alors une opposition pas forcément frontale, dans le sens où généralement les personnes qui s’adressaient à nous ne dévoilaient pas leur identité, mais le contenu était très explicite.
Metaxu : Et malgré cela, vous avez tout de même pu continuer à développer ce projet parce que vous avez trouvé des subventions de plus en plus importantes, et, en parallèle au fait que vous avez pu en plus faire venir des gens de plus en plus loin et notamment d’Europe, vous avez également pu mettre sur pied une bourse ?
S. A. : Oui, en effet. Aujourd'hui, je ne fais plus partie de l'équipe de Philo-Situé.e.s parce qu’il s’agissait d’un projet étudiant et puis je suis partie de l'institution, donc je suis très contente que le projet continue, et les conférences sont fascinantes. L'équipe reçoit vraiment des gens très intéressants. En effet, quand nous avons mis sur pied cette bourse, l'idée était de pouvoir, avec l'argent reçu, soutenir certaines personnes en philosophie qui aurait besoin de soutien financier, et qui faisaient partie d'un groupe marginalisé. Nous avons mis cela en place, et je pense que la bourse existe toujours (à vérifier). Nous avions mis ça en place il y a quelques années pour pouvoir, chaque année, donner un montant - un peu symbolique mais qui pouvait quand même aider je crois - des étudiantes en philosophie à continuer leur parcours.
Metaxu : Et vous avez également créé une liste de femmes philosophes. Mais peut-être est-ce déjà plus en lien avec ton propos - vous aviez également noté une disparité dans la représentation des étudiant.e.s, notamment en terme de décrochage plus fréquent chez les jeunes femmes que chez les jeunes hommes - jeune ou pas - parmi les étudiant.e.s en philosophie. La bourse visait-elle également à palier à ceci ? Était-ce pensé pour que des étudiantes se signalent à vous, vous indiquent qu’elles étaient en difficulté, notamment financière ?
S. A. : Oui, la bourse va dans ce sens-là. Nous pensons que le décrochage affecte plus les femmes que les hommes, et particulièrement les personnes dans des situations socio-économiques plus difficiles, les personnes racisées, les groupes généralement marginalisés. En ce qui concerne les femmes, le fait que la représentation soit déjà si basse, fait en sorte que la philosophie ne semble pas être un milieu dans lequel les femmes se développent, réussissent. Donc la sous-représentation crée cette idée selon laquelle on peut étudier un petit peu en philo et puis en tant que femme, et puis, ensuite… Il est temps de de passer aux choses qui nous concernent… Ce qui est, je pense, une conception évidemment problématique et fausse, mais qui est due à ce manque de représentation et qui peut expliquer en partie le décrochage. Ce qui peut également être expliqué par le fait que beaucoup d'hommes sont éduqués avec l'idée selon laquelle il faut devenir indépendant et s'autonomiser et, pour cela, faire ce qu'on aime, et la philosophie correspond à tout un tas de d'idées d'argumentation très rigoureuses qui est souvent très associé au masculin.
Donc, en fait, il y a énormément de choses derrière l'idée que cela va être plus les femmes qui vont décrocher que les hommes. Les femmes ont beaucoup plus de responsabilité qui sont considérées comme leur revenant, dans tout ce qui est le care, de prendre soin de la famille, et donc quand il est question que, dans un couple par exemple hétérosexuel, qui correspond à tout ce qui est normé, hétéronormé, une décision doit être prise pour que l'un ou l'autre donne plus de son temps, cela va souvent être la femme plutôt que l'homme. Et dans ce cas, la philosophie peut être mises de côté chez les femmes, suivant tout un tas de raisons très difficiles à déconstruire. Je donne ici un peu en vrac des idées de source de décrochage. En ce qui concerne la place des femmes, l'idée était qu’en octroyant un soutien financier pour des femmes potentiellement en état de décrochage pour des raisons notamment financières, cette bourse pouvait leur permettre de continuer un petit peu, de voir également qu’elles étaient soutenues, et de voir également que leur travail mérite d'être continué, que des personnes espèrent qu'elles vont continuer leur travail en philosophie.
Metaxu : En t’entendant, je ne pouvais pas m'empêcher de penser à une anecdote que j'ai entendue comme ça, au détour d’une discussion avec un étudiant qui était en kot comme on dit en Belgique, c’est-à-dire en colocation avec sa compagne, et peut-être avec d’autres étudiants, je ne sais pas,… Bref, cet étudiant est tombé malade pendant plusieurs mois et, malgré cela, a finalement réussi son année, mais sa compagne, qui s'est occupée de lui, elle, n'a pas réussi parce qu'elle s'est tracassée plus, et parce qu'elle elle a pris soin de lui. C'est une anecdote mais c'est aussi l'intérêt de ce type de projet : la rencontre entre les outils théoriques et la vie quotidienne. Et essayer de voir si ces soubassements percolent, qui sont pourtant a priori invisibles, et qui, dès lors qu’ils sont conscientisés, deviennent tellement criants : on se demande alors si dans des exemples tels que je te le rapporte, il n’y aurait pas quelque chose à à l'œuvre. Et lorsqu’on les a en tête, on commence à les déchiffrer partout. Et en ce qui concerne la liste alors ? Dans cette idée de continuer à visibiliser, soutenir et valoriser ?
S. A. : Oui, l’idée derrière cette liste était qu’avec le manque de représentation, ce n’était pas seulement lié au fait qu’il n’y avait pas beaucoup d'étudiantes, ou de professeurs femmes en philosophie, mais également que ce qui est étudié en philosophie, ce sont surtout des hommes blancs, et morts pour la plupart ! Et que donc ce prétendu canon, rigide que la philosophie est faite par des hommes mais ce qui nous a semblé évident était que ce n’était pas le cas. Ce canon pouvait être revisité. L’idée derrière cette liste était de montrer qu’en fait, il y a déjà beaucoup de femmes philosophes, et puis de donner des outils concrets pour des personnes qui voudraient diversifier un petit peu leur plan de cours par exemple. Nous avions réalisé une liste avec des recoupements par thème donc, pour chaque thème de la philosophie que nous avions identifié, il y avait tout un tas de sources, d'auteures femmes qui pouvaient être utilisées.
Metaxu : Cela a été un des points soulevés au Congrès féministe justement : un des premiers points à mettre sur pied était celui-là. Le Canada est toujours bien en avance sur ce type de questions.
S. A. : Il y a des problèmes partout mais c'est vrai que, oui, il y a quelques mouvements comme ça qui commencent au Canada, c'est vrai.
Metaxu : Et dans cette optique, pourrais-tu nous présenter ton domaine de recherche ?
S. A. : Je travaille en philosophie de l'esprit et en philosophie de la psychiatrie. La philosophie de l'esprit est liée à l'esprit humain, donc à la façon dont on traite un petit peu l'information qui nous entoure. Je m'intéresse particulièrement à la question des émotions et de la conscience. Tout cela se regroupe un peu sous le concept qui m'intéresse beaucoup, celui de ressenti. Qu'est-ce que c'est que le ressenti ? Comment cela marche ? Où est-ce qu'on le trouve dans l'humain, dans le corps, dans le cerveau ? Et, par extension, dans ce qui n’est pas humain : dans les animaux par exemple. Ce qui m'intéresse, c'est la question des émotions et de la conscience émotionnelle : qu'est-ce qui se passe quand on est conscient de ce qu'on ressent ? Peut-on ne pas être conscient de ce qu'on ressent ? C'est une question qui m'a occupée pendant beaucoup d'années. Par ailleurs, j'ai beaucoup travaillé sur l'autisme et sur ces question-là appliquées à l'autisme. Aux différences entre personnes autistes et personnes non-autistes, dans le fonctionnement de la conscience émotionnelle. Donc comment les personnes autistes et les personnes non-autistes se rapportent à leurs propres émotions, se rendent compte qu'elles sont en colère, se rendent compte qu'elles sont tristes, etc. Cette étude de l'autisme m'a menée à ce champ qui est la philosophie de la psychiatrie qui commence un petit peu à émerger depuis quelques années, dont on entend de plus en plus parler ces dernières années. Cela m'a fait m'intéresser à des questions un peu plus fondamentales, un peu plus théoriques comme, par exemple, qu’est-ce qu’une catégorie en psychiatrie ? Est-ce nécessairement une pathologie ? Ou est-ce que ça peut être autre chose ? Et dans le cas de l'autisme, je m'intéresse au mouvement par exemple de neurodiversité qui promeut une inclusion et une reconnaissance des personnes autistes, plutôt qu'une pathologisation. Je m'intéresse à l'impact de ces mouvements sur la connaissance scientifique.
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