top of page

Tiphaine Leclercq

Illustratrice

/

Metaxu : Dans quel champ artisitique évolues-tu ? 

TL : Je suis illustratrice. Je travaille l'image, globalement. Pas du tout de photo,  mais le dessin, l'illustration vraiment. Avec tout ce que cela peut englober. J'ai toujours dessiné parce que j'en ai envie, cela me fait du bien. J'ai toujours été fan d'images, quelqu'elle soient. Cela peut être des packaging, des cartes postales, des œuvres d'art absolument folles, je suis une consommatrice d'images, j'apprends beaucoup avec mes yeux, je m'émerveille,... 

 

J'ai toujours découpé, pas tellement dessiné, mais je faisais beaucoup de découpages, de collages. Je récoltais des images pour en reconstruire d'autres. Au final, c'était déjà un peu ce que je fais aujourd'hui, parce que je pige beaucoup, je regarde beaucoup de choses, et c'est en voyant des choses  - cela peut aussi être des films, des  spectacles, des images au sens large, cela va provoquer des choses et me donner envie de raconter. Je vais me dire ça, il faut en parler. Cela va repasser comme cela, comme par un prisme et ressortir sous formes d'autres images. Cela pourrait ressortir autrement, mais c'est le plus simple pour moi, le plus naturel. 

Donc pourquoi l'illustration ? Finalement, parce que mon style s'y prête bien. Que ce soit de la communication, du

packaging à de la carte postale,... Cela se voit quand on regroupe les projets de commande, on voit qu'il y a la touche du client, ce n'est pas un propos strcitement personnel. Le dessin est au service de quelque chose, alors que dans ma partie perso, le dessin...est au service de lui-même, en tout cas, il ne répond à personne. Il est à mon service, dans la mesure où cela me fait du bien, j'aime le faire et quand je le fais, c'est mon espace de liberté. Quand on a cet espace-là, on s'y engouffre car dès que l'on a goûté un peu à ces moments de grâce, quelque prend corps, quelque chose se passe en nous. 

 

Par conséquent, même quand tu travailles sur un projet personnel, c'est cela aussi qui appelle tes clients, qui les amènent au bon projet, à ce projet qui va t'intéresser ou qui va faire sens pour to. L'un nourrit l'autre en fait, cela te nourrit parce que cela nourrit aussi les autres. Cela pourrait rester caché dans un tiroir mais moi j'ai besoin que cela existe au monde, j'ai ce truc d'avoir besoin de le partager. C'est ma seule vraie façon de communiquer en fait. 

 

Metaxu : Tu réalises beaucoup de dessins de corps de femmes nues. Le féminin est-il une thématique importante pour toi ? 

TL : ce n'est pas un thème que j'ai consciemment choisi en me disant "il faut en parler" mais cela évolue. Par exemple, aujourd'hui, je commence à me dire il y a des choses dont il faut parler, aborder des sujets un peu moins plaisants, un petit peu plus touchy, on a un petit peu peur presque de lesser les gens en partageant certaines opinions ou des croyances en tout cas. Dans certains cas, je me dis qu'il faut l'aborder car c'est encore un peu trop tabou....

Mais à la base, ce n'était vraiment pas volontaire de parler de sujets de la féminité, mais cela ressort. C'est avant tout par les  remarques, les retours extérieurs, que j'en suis venue à ce constat. Ensuite, je me suis posée la question : pourquoi ne pas, finalement, essayer de comprendre ce qui m'anime et tenter de comprendre pourquoi j'ai envie de continuer sur ce sujet-là ou pas. Je pense que cela vient juste du fait que suis une femme, et qu'à un moment donné, je me suis dit : il y a des choses qui me différencient finalement d'un homme. Il n'y a que ça que je vis vraiment, c'est quelque chose qui m'anime, alors cela ressort, je ne sais pas, pourtant je suis pas plus féminine ou moins féminine que quelqu'un d'autre, mais c'est un thème, oui, qui revient : le rapport à son propre corps. Il y a peut-être une forme de finesse qui, je pense, fait penser à la féminité, même dans des choses que je veux plus masculines. Ce sera toujours un peu fin, et puis le corps, le corps, le corps, c'est quelque chose de très important pour moi d'être bien dans son corps. Puisque nous sommes incarné.e.s, il faut être bien dans son corps, et il se fait que j'ai un corps de femme donc une vie de femme, et je ne peux vraiment parler que de ça, je ne saurais pas quoi dire sur la masculinité. 

De même, vendre à des clients des corps féminins, souvent nus, avec des sujets pas toujours évidents... Ces sujets ne sont pas abordés avec des mots, c'est compliqué à exprimer, alors j'en parle en images. Là aussi, au début, j'avais peur de les montrer, mais finalement, cela m'a apporté des projets sur la danse, sur la maternité - comme ce projet portant sur l'accompagnement de la maternité par la danse, pour avoir un rapport à la gynécologie plus doux. Et là, je me dis "Mais c'est génial !" Ce projet tombe du ciel car tu appelles les projets sur lesquels tu es déjà à l'aise en fait.

Metaxu : Te considères-tu comme une artiste féministe dans ce cas ?

TL : Quand je dis  que nous évoluons dans une société patriarcale, je le dis sans colère, mais, par contre, quand on me dit : "Non, cela ne me concerne pas,  parce que moi, je suis un gars bien..." Là, oui, cela m'énerve. Je pense que certaines choses passent mieux en douceur, même parfois je suis un peu tout feu tout flamme. Mais c'est là aussi que

mon travail est important pour moi-même - vraiment juste pour moi-même - parce que cela me pose, donc je vois

bien que cela fonctionne mieux quand je me pose, et que les choses se créent mieux comme cela. Après, oui, société patriarcale, parce que c'est comme ça. Il y a eu des sociétés matriarcales, il y en a, mais ici, ce n'est pas le cas. La domination du masculin, c'est une réalité, donc voilà,j'en prends conscience maintenant. 

 

Je pense qu'il y a beaucoup de femmes de caractère dans mon entourage, et qu'aucune ne se laisse dominer par des hommes, je n'ai pas grandi, par exemple, avec des idées telles que les règles c'est sale - je pensais à cela parce que pour l'instant, c'est un sujet que l'on voit beaucoup. J'ai découvert ce tabou autour des règles. Moi, quand j'ai eu mes premières règles, j'ai couru l'annoncer aux femmes de ma famille. Aujourd'hui, avec du recul, je ne le ferai pas mais c'était une nouvelle donc je suis allée l'annonce à mes tantes. C'était comme un gran pas, comme si j'annonçais que j'allais me marier.  Je n'ai pas le souvenir que l'on m'ait encouragée ou non à en parler, mais on

m'a laissé faire et c'était normal pour tout le monde. La réponse générale était du style "C'est cool pour toi." Cela veut aussi dire que ton corps fonctionne, d'une certaine façon que tout va bien. J'avais aussi eu des copines dont les règles n'arrivaient pas, et cela représentait un problème pour elles, elles ne se sentaient pas devenir ados, elles ne se sentaient pas grandir. C'est un exemple très précis et concret qui, je trouve, révèle le fait que je n'avais pas de problème avec la féminité. C'est en grandissant et en m'ouvrant un peu plus aux problèmes des gens, des autres, et de la société que j'ai réalisé que je n'avais jamais vécu ma féminité comme un obstacle ou une une contrariété. 

Je me suis également rendue compte par contre que cela a également amené certaines douleurs que les hommes ne pouvaient pas saisir, pour lesquels ils étaient nécessairement extérieurs à cela. Et je me suis rendue compte qu'à force de bien vouloir parler et d'exprimer finalement ces trucs-là qui était en lien avec la féminité, les hommes comme les femmes me laissaient la parole, sans rien dire, en me laissant en parler, sans volonté de conseil ou de me cajoler. Juste me laisser la parole. J'avais donc un entourage hyper bienveillant et soutenant. 

Mais, je me suis, il y a quand même un truc à poser en fait, et c'est là, c'est avec ces choses plus difficiles que j'ai fini par comprendre que cela me ifférenciait finalement, la féminité. Et qu'il y avait des choses liées à ma

féminité qui me différenciait nécessairement, où je me disais : "Toi, en tant qu'homme, tu ne vivras cela en fait. Tu pourras faire toutes les expériences de la Terre, cela tu ne le vivras pas en fait. C'est impossible parce que tu ne le peux pas dans ton corps, c'est impossible. Et, du coup, c'est là que je pense que j'ai assumé, que j'ai pris la féminité comme étant un vrai sujet dont je voulais parler. Alors, cela transparaissait déjà un peu avant, mais ce moment a vraiment été comme un pivot. Mes envies de dessin viennent toujours de là, d'exprimer que j'étais différente, et, comme c'était difficile de le mettre en mots, je l'ai dessiné. Ces dessins-là, à la base, n'étaient pas tous des dessins de nu. Ils datent d'environ 1 an, de 6 mois et n'étaient pas destinés à être publiés en fait. Et, je me suis dit, c'est dommage parce que je pense qu'il y a quand même quelque chose dans ces dessins, et finalement je les ai montrés et alors là... Succès ! 

 

Metaxu : Quelle a été ta formation académique ? 

TL : J'ai vraiment un parcours un peu en entonnoir, c'est-à-dire qu'alors que je ne dessinais pas quand j'étais

petite, je faisais des découpages : je récoltais plein d'images - encore une fois ce truc de me nourir d'images - donc les prospectus, les magazines des parents... J'avais des piles comme ça quand ils avaient fini de dire leur magazine et

que je le récupérais, puis je découpais dedans, et entre les magazines féminins de la maman, et les magazines de

cinéma ou de photo du papa, j'avais quand même pas mal de choses... D'ailleurs, j'ai encore certaines publicités, des vieilles publicités magnifiques... Par exemple, une Chanel entièrement illustrée (on n'en fait plus beaucoup honnêtement des trucs comme cela). J'ai donc commencé comme ça, j'ai toujours été dans l'artistique. Mes parents m'ont toujours laissé faire ce que je voulais, donc voilà, j'étais plutôt là-dedans, la danse aussi. Puis j'ai voulu faire du

théâtre,... Tous les trucs artistiques, quoi. 

J'ai donc vite voulu rentrer à l'Ésaat à Roubaix au lycée. Donc, j'ai fait un bac appliqué. Dès la seconde, on a 8h de matières artistiques pendant la semaine, et je crois qu'en terminal, on avait une vingtaine d'heures de cours par semaine. C'est beaucoup quand même sur une semaine à 30h, je crois qu'on avait 23 heures de cours artistiques. On y étudie tous les domaines arts appliqués : la communication visuelle, le design d'objet, l'architecture, le stylisme. Moi, je voulais être styliste à la base parce que les costumes dans les films ou au théâtre, dans les comédies musicales, je trouvais cela magnifique. Mais, je me suis vite rendue compte que je voulais surtout dessiner. Je suis alors partie en BTS Communication Visuelle. Là, en gros, c'était le domaine de l'image. L'approche technique du stylisme ne me parlait pas tant que cela, j'aimais beaucoup plus créer un univers visuel par les croquis donc je suis partie vers l'image en soi. Je suis partie là-dedans, sachant que j'ai fait entre-temps une année de fac, et c'est là que j'ai commencé pour ne pas m'ennuyer. Je n'avais que 18h de cours et c'était à côté de chez moi, je manquais cruellement de stimulation. Donc, pour me stimuler, j'ai décidé de vraiment reprendre le dessin, pour moi, pour enfin faire mes petits dessins à moi, et j'ai commencé à les vendre. Cela a commencé comme cela. Ensuite, je suis retournée en BTS où j'ai fait du graphisme, et puis... le graphisme, c'est bien, mais je voulais vraiment dessiner, en fait. En graphisme, on ne dessine pas, on bricole des images. On fait un peu de la magie : on va retoucher des photos, on va créer des univers, mais ce sont des univers uniquement au service du client, donc notre patte n'est pas vraiment mise en valeur, à moins d'être vraiment un grand graphiste avec un talent de fou. Il y a des agences de graphisme sur Paris, ou même à Lille) qui travaillent dans de la pub et qui ont vraiment des pattes. Ils sont presque

illustrateurs mais sans le côté plastique, et, vraiment, comment dire, la sensalité du pinceau... Ce n'est pas forcément ça ! Mon univers est plutôt plastique. C'est comme cela que j'ai intégré l'Académie royale des Beaux-Arts de Bruxelles. Mon parcours scolaire s'est arrêté là. 

 

Metaxu : Comment as-tu lancé ta carrière ?

TL : Après, j'ai travaillé en tant que graphiste, et je faisais d'illustration aussi. Mais, après 2 ans, j'avais un peu fait le tour, et je me suis dit qu'il était temps de me lancer. Les planètes étaient alignées et tout me poussait à partir. Maintenant, cela fait 2 ans et demi, que je ne fais plus que de l'illu, et j'espère pouvoir continuer à progresser comme cela, parce que je ne vois pas ce que je pourrais faire d'autre. C'est une nécessité pour moi.  

La première question a été financière : je pars, ok, mais à quelles conditions ? Je n'allais pas démissionner. Mais je n'étais plus épanouie au travail, donc dans tous les cas, il fallait que cela s'arrête. J'allais mal en fait, tout simplement. Et tu te dis que c'est peut-être démesuré, parce que j'avais tout pour aller bien mais ce fameux indicateur du "cela a tout pour aller bien mais magré cela, quelque chose ne va pas". Et dans ces cas-là, il faut se poser la question : qu'est-ce qui ne va pas ? En plus de cela, il y avait des changements dans l'entreprise, tout à fait légitimes, mais qui moi m'effondrait. Il était temps de partir. Même des collègues qui, si elles voient ceci se reconnaîtront, me disaient que j'étais plus artiste que graphiste. J'étais une bonne graphiste mais plutôt par mon œil de fan d'images, et de créatrice d'images, que vraiment par des grilles de mise en page maîtrisées. J'ai donc signalé que je voulais partir et on m'a dit "d'accord, on on va t'accompagner dans cette démarche-là". Je suis donc partie en rupture conventionnelle. Je ne trop comment cela fonctionne en Belgique, mais en France, cela veut dire que les deux parties sont d'accord pour arrêter le contrat, et du coup, tu peux t'inscrire au Pôle emploi. Je me suis donc inscrite en tant que créatrice d'entreprise. Tu as dans ce cas-là les mêmes droits que quelqu'un qui aurait été licencié pour raison économique, cela te donne une sécurité transitoire, le temps que tu commences à faire du chiffre d'affaires.  Le premier mois, tu ne peux pas faire de chiffre d'affaires, ce n'est pas possible, tu n'as quasiment que des dépenses (tu paies ton site, ...) et forcément tu dois intégrer l'idée que tu dois baisser ton niveau de vie. Par exemple, une entrepreneuse de Lille a fait un post sur Instagram en étant très claire, en disant que même quand ton entreprise est 

rentable la première année, tu peux espérer te payer environ 800 € par mois la première année, 1000 € la deuxième. Et pourtant, c'est viable mais il faut faire attention. Et tu fais tout pour ton entreprise, c'est comme ton bébé. 

Actuellement, j'ai deux statuts : un à la Maison des Artistes, donc là c'est quand vraiment je vends une prestation de création d'illustration ou un original. Et pour tout ce qui est de vendre, type papeterie ou lorsque je fais des affiches,  des choses comme ça, là, je suis en micro-entreprise. C'est un statut simplifié via lequel tu peux vendre, comme par exemple quand j'achète du stock et que je le revends, ce qui ne peut pas passer sur la Maison des Artistes. Tu as donc un seul numéro de SIRET mais qui correspond à deux activités. 

 

 

Metaxu : Te considères-tu comme une artiste féministe ? 

TL : On qualifie beaucoup ce que je fais de doux. Mais avec les derniers événements, c'est difficile de se positionner et de dire : "Coucou, moi, je vous montre des femmes, des choses qui trait au plaisir, à la féminité, au bien-être et enfin à la douceur" alors qu'il se passe des trucs affreux dans le monde - et tout le temps d'ailleurs. Moi, je partage des petites choses, enfin, comment dire, continuer à de ma petite vie, avec mes petites illustrations, c'était un peu délicat. Et puis, finalement, je me sui dit, non mais c'est un choix en fait, assumé, de ce dire que je parle de la douceur. Parce que c'est ce qui transpire un peu, je pense, de ce que je fais, de ce que je produis. Mais il y a aussi la douleur en fait, et douleur-douceur pour moi, on ne peut pas les dissocier. L'un n'existe pas sans l'autre. Et à force de renier la douleur, et bien je me coupais d'une partie de moi-même. Et l'accepter, c'est aussi faire avancer son travail. D'un coup, on se dit  : oui, c'est normal, cela fait partie de la vie, c'est en nous, c'est normal. En chacun il y a du bon et du moins bon, et d'amener ça aussi dans le travail, c'est lâcher prise un petit peu. Et, en tout cas, accepter

l'entièreté, ne pas vouloir ne faire que du Beau et du Bon - à un moment donné, c'est ce que je faisais, ce que je m'évertuais à faire, et c'est ce qui me fatiguait le plus.  Voilà, ça, c'est le gros travail que je fais en ce moment, et je pense qu'il définit le mieux ce que je veux transmettre.

 

Donc au final, je parle de la douleur avec aussi un peu de douceur finalement, parce que ce sont des dessins qui sont très bien passés, parce que j'en parle avec pudeur, parce que c'est très compliqué, et parce parce que cela touche toujours à l'intime. Donc la douceur, on a l'habitude de la voir, on la glorifie, mais la colère, enfin toutes ces

choses dites négatives, on ne veut pas les voir en fait. C'est concentré dans le journal de 20h, et cela s'arrête là.  Cela nous met mal, on n'a pas envie de voir ces choses et finalement se que si, on peut en sortir de la beauté... C'est une histoire d'équilibre.  Il faut le vivre aussi, pas juste le savoir, il faut l'intégrer. Et cela passe dans mes dessins. Je pense

vraiment que dans tout ce que je vais faire, et dans tout ce que je vais trouver juste, tout dans ma production va parler de ça. Même de manière sous-jacente. Même si c'est un chat qui chill sur un canapé, dans le fond, il y a peut-être un petit peu de cela, en tout cas dans la façon dont c'est dessiné. S'il y a ça, l'image est juste. 

 

A part cela, je n'ai jamais eu l'impression qu'on me claquait une porte au nez parce que j'étais une fille, que dans ce cas je n'aurais pas été assez bien. Dans la société, oui, cela peut être difficile parfois d'être une femme, parce que parfois tu te rends compte que tu ne peux pas t'habiller comme tu veux, parce que juste tu as la flemme qu'on vienne te parler. Là, oui, tu te rends compte qu'en effet, c'est pénible. Mais je n'éprouve pas cela dans ma vie artistique. Voir même, cela nourrit mon approche artistique en fait. Car peut-être que montrer des corps féminins, et espérer que cela ne soit pas censuré, juste parce qu'il y a un téton, ou parce qu'on voit un sexe de femme... Si c'est fait avec avec finesse, ça passe. En fait, il faut habituer les gens aux images. 

 

Par exemple, j'ai fait une collaboration avec une box féministe belge, la F-box. La thématique de la première box était le clitoris. Bettina m'avait dit "Autant rentrer tout de suite dans le vif du sujet" donc elle m'a laissé carte blanche. Il s'agissait de réaliser un petit dessin qui serait dans les boxes.  Et bien, apparemment, cette image a été

censurée. En tout cas, elle ne pouvait pas sponsoriser son post sur Instagram. J'ai trouvé cela complètement fou.

Parce qu'en plus, au début, je me suis dit que cela n'allait pas passer, parce qu'à la base, elle était nue, puis finalement, je lui ai rajouté une culotte et un soutien-gorge, mais cette culotte était transparente, et elle avait les jambes écartées,...  Pour moi, c'est le désir, le plaisir - enfin le plaisir plus que le désir - mais c'est très bien passé auprès du public.  L'idée derrière cela était que tous les clitoris ne fonctionnent pas de la même façon, tout le monde pense connaître le clitoris et c'est génial, mais non, cela ne fonctionne pas pareil pour tout le monde. 

 

C'est un peu comme en '68, la libération sexuelle ok, mais du coup faut avoir une vie sexuelle hyper intense, mais non en fait, ce n'est ça la lib, on s'est trompé, ce n'est pas cela le vrai message, il faut avoir d'autres injonctions en fait. Et, du coup, l'idée était vraiment : tous différents, apprend à connaître le tien et puis ensuite fais-toi plaisir, et partage aussi, enfin ne garde pas pour toi. Je trouvais que c'est c'était un un truc sympa à porter. Mais alors, pareil, il faut l'assumer derrière de dire : "bah ouais, c'est ça le message : découvre ton corps." Parce que tu ne peux pas demander à quelqu'un de comprendre comment tu fonctionnes si toi-même, tu ne sais pas. 

Donc, c'est touchy, mais mieux vaut en parler, et finalement tu en parles : moi j'en parle à mes frères, on en parle au

réunions de famille - on ne rentre pas dans les détails bien sûr - mais ce sujet-l ce dont on parle là, maintenant, on considère cela comme important. Donc pouvoir porter des projets comme ça, c'est juste magique de pouvoir se dire que ce tu fais, cela a du sens.

Newsletter

bottom of page